Les Oynours
Généralités
Les Oynours sont un peuple nomade des steppes de l'est et représentent environ 40 % des peuples sous l’influence de XHIA. Ils vivent en petites tribus itinérantes en suivant les migrations des rennes et des oiseaux sauvages. Chaque tribu compte une cinquantaine d'individus, principalement des femmes car les hommes ont tendance à mourir jeunes dans les guerres de l'empereur XIAH. Un mode de vie assez frustre, basé sur des déplacements quotidiens à dos de cheval ou dans de grands chariots a forgé un peuple rude et sauvage, qui ne se reconnaît pas d'autre maître que l'empereur XIAH.
Morphologie
Les Oynours vivent dans des régions glaciales en hiver, où l'été est de courte durée. La nourriture est rare dans les steppes, les laitages et la viande forment la plus grande partie de l'alimentation. La morphologie des Oynours est donc trapue, de petite taille, composée d'hommes et de femmes maigres aux corps noueux et vite tordus par la vie.
Les hommes mesurent de 1m50 à 1m70, pour un poids de 50 à 80 kg. Les femmes mesurent de 1m45 à 1m60, pour un poids de 45 à 60 kg. Les Oynours ont la peau jaune foncée, les yeux très noirs et les cheveux noirs et épais. Les hommes ont les cheveux coupés courts et portent la moustache ou la barbe. Les femmes ont les cheveux longs souvent tressés en une natte unique ou enveloppés dans une sorte de gaine en cuir, le sanduk.
Mode de vie
La vie des nomades Oynours s'articule autour des troupeaux de rennes sauvages dont ils suivent la migration à travers les milliers de kilomètres de steppe qui relient le sud du royaume Oynour au nord du continent. Les troupeaux sont rapides, les nomades se déplacent donc à cheval sur de petits chevaux des steppes, tandis que les familles suivent dans de grands chariots en bois (les yükmakiq) semblables à des roulottes tirés par des chevaux. Chaque famille possède quelques chèvres attelées au chariot et un ou deux chiens qui courent à côté. Le soir le campement est dressé en disposant les chariots du clan en cercle autour d'un grand feu central. En été une tente est rapidement montée, la yörte. Toute la famille se rassemble dedans pour dormir, en ne laissant que les anciens dans le yükmaki. En hiver, les familles dorment dans les chariots, entassées dans la plus grande promiscuité car les troupeaux se déplacent quotidiennement pour trouver leur nourriture dans la neige.
Une tribu se compose d'une demie-douzaine à une douzaine de familles, chaque famille comptant huit à dix personnes : grand-parents du père, parents et enfants tous réunis. L'autorité repose sur le père de famille et le grand-père, ou à défaut sur le fils ainé si les deux hommes les plus anciens sont absents ou morts. Chaque tribu élit un chef, le bashliq. Autrefois le chef était celui des hommes qui arrivait à vaincre les autres hommes lors de duels au poignard traditionnel, le pichaq. L'empereur XIAH a interdit ces pratiques qui décimaient ses armées, et ce sont maintenant de simples luttes à mains nues qui permettent de distinguer le plus fort... Le bashliq décide quand le camp doit être levé, quel troupeau doit être suivi et donne son accord pour marier les filles de la tribu.
L'alimentation des Oynours est basée sur la viande et les laitages tirés du lait de chèvre : lait frais, caillé, fromage et yaourts. La viande provient en grande partie des rennes, mais un dicton Oynour affirme que « tout ce qui ne parle pas peut être mangé, et encore ! » Tout oiseau qui passe à portée de flèches, tout animal du rat au serpent, en passant par le hérisson et le chat sauvage, peut être chassé et sera ensuite cuisiné et mangé. Le renne est traité différemment des autres animaux : sa cervelle et ses cuisses sont mangés crus, pour augmenter la force physique et le reste est très peu cuit pour être consommé saignant. En été, des baies sauvages, de la laitue des forêts et des champignons viennent compléter l'ordinaire.
Toute la journée s'organise autour des troupeaux de rennes et des corvées à effectuer. Les anciens qui n'arrivent plus à monter à cheval font des travaux d'entretien : tissage de vêtements en laine de chèvre ou en crin de cheval, vannerie, taille du bois d'œuvre et coupe du bois de chauffage... Les femmes s'occupent de la cuisine, du ménage, des enfants. Les hommes et les garçons assez grands pour monter à cheval (vers sept ans en moyenne) s'occupent de diriger les troupeaux et de chasser. Le repas du matin se compose de viande froide et de fromage, les hommes sont servis en premier puis les femmes et les enfants mangent une fois qu'ils sont partis. Le midi, seule une légère collation est servie : c'est l'heure où le soleil est le plus haut, on ne doit pas gâcher son temps à manger ! Le soir, quand les hommes rentrent, un grand repas est servi : viande de renne et d'autre animal chassé, laitages, yaourts. Quand ils peuvent troquer de la farine contre de petits objets artisanaux, les Oynours aiment ajouter des galettes de blé et de beurre rance au menu, leur goût acide s'accordant très bien avec la viande forte des rennes. Les Oynours boivent de grandes quantités de lait et du thé. L'alcool est rare chez eux, mais quand ils peuvent s'en procurer ils ne ratent pas l'occasion...
Les dughaq sont les chamans, les religieux de leur peuple. Ils vivent comme les autres Oynours et participent aux travaux collectifs, cependant leur rôle d'intermédiaires avec les esprits leur donne une grande influence dans la tribu. C'est à lors de l'initiation de la puberté, quand il va vivre quelques semaines chez un dugha, que les talents de chaman sont détectés chez un enfant. Avec l'accord de ses parents, il va venir vivre chez le dugha définitivement. L'initiation est longue et douloureuse...
La première année, l'apprenti apprend les prières et les rituels qui permettent de contacter les esprits. Au bout d'une année complète, il subit son Gudjuk. L'apprenti est suspendu au poteau central du yükmaki par des crochets plantés dans le dos et le torse durant trois jours et trois nuits. Il ne reçoit aucun soin, aucune nourriture, aucune boisson : c'est sa mort rituelle, pour que les totems acceptent de le voir. S'il survit à l'épreuve, l'apprenti épuisé est décroché du poteau et le dugha découpe alors la peau de son crane avec un silex en partant de l'oreille droite jusqu'à l'oreille gauche en suivant la courbure du front. La peau est ensuite délicatement relevée et un trou de la taille de l'ongle du pouce est découpé dans l'os du crane. Les totems peuvent maintenant visiter le jeune dugha sans difficultés ! La peau est est ensuite doucement reposée sur l'os du crane, et une pâte cicatrisante est posée sur la plaie. Après plusieurs jours, voire plusieurs semaines, de délire dû à la fièvre et à la douleur, le jeune dugha peut enfin se relever. La tribu le reconnaît comme un dugha même s'il reste encore apprenti.
Il devra en effet subir encore deux fois cette épreuve pénible à la fin de la deuxième, puis de la troisième année. La deuxième année son épreuve est appelée le Tomak, et le son du tambour du dugha va rythmer sans jamais s'arrêter toute la durée de la suspension, puis de la trépanation où la peau sera ré-découpée sur la cicatrice et un second trou sera fait au sommet du crane. Plusieurs dughaq se relaient durant l'épreuve pour battre du tambour. Certains apprentis finissent par tomber fou sous le mélange de souffrance et de son rythmique, ils sont alors égorgés et leur sang rentrera dans la composition de poudres de plantes traitant la démence.
A la fin de la troisième année survient le Hugah. A la fin de la belle saison, avant que les rennes ne repartent, le jeune dugha doit se construire une hutte de branches au bord d'une forêt. Le tronc d'un gros sapin sert d'armature centrale et de pilier sacré. Il devra vivre là durant une année entière, nomade sédentarisé, pour prouver qu'il peut vivre sans recourir à la tribu et aux rennes nourriciers. Il devra chasser durant les dernières belles semaines et se constituer de grosses réserves de nourriture. Durant l'hiver glacial il devra affronter seul les périls, la maladie et la faim. Au retour des beaux jours, sa tribu reviendra et s'il a survécu il subira le Humok, le dernier gudjuk. Il sera suspendu par les chevilles à un gros arbre, sapin ou chêne, jusqu'à ce qu'il perde connaissance. La tribu le décrochera alors, et chaque homme plantera une fine aiguille de bois dans le corps du jeune dugha, transperçant ses muscles du dos, des bras et des cuisses. L'apprenti sera ensuite aspergé d'eau puis le dugha lui retirera chaque aiguille de bois en récitant la phrase rituelle : « Tobor mingar huduk ! Kudza omgur korog ! » (je te retire cette aiguille du corps, pour que ton esprit se retire du monde). Le jeune dugha sera alors trépané une troisième et dernière fois, la peau de son crane de nouveau découpée sur la cicatrice et un troisième et dernier trou lui sera percé dans l'os frontal. Il est un chaman accompli, un dugha.
Il y a quelques siècles, l'empereur XIAH a soumis les tribus Oynours à la tête de ses armées. Il a détruit les poteaux sacrés transportés par les dughaq (les chamans) et il a tué de nombreux dughaq sans que leurs esprits leur viennent en aide... Les Oynours en ont conclu que l'empereur XIAH avait tué et dévoré leurs dieux, et ils l'ont reconnu comme leur dieu : l'empereur qui règne sur les étoiles et la lune, qui commande au soleil et fait tomber la pluie. Depuis cette époque, les tribus Oynours vont de plus en plus loin dans l'ouest, sur ordre du Dieu Empereur. Ils repèrent les routes, les grandes villes, et parfois se regroupent à plusieurs tribus pour lancer des razzias sur de grosses bourgades : pillage des vivres (indispensable car il n'y a pas de troupeaux de rennes dans ces régions !), terreur de la population, capture d'esclaves et de butin ramenés aux collecteurs de taxes du Dieu Empereur. Les Oynours sont les éclaireurs, les cartographes et les voltigeurs de l'empereur XIAH.
Armes, armures, vetements et autres tenues.
Les Oynours s'habillent de fourrures épaisses en hiver, plus fines en été. Les fourrures sont tannées en étant placées au printemps dans des trous recouverts de végétaux pourrissants, détritus et excréments... A l'arrivée de l'hiver, quand les troupeaux repassent dans le même endroit, les Oynours n'ont plus qu'à retrouver la cachette et à prélever les peaux. Les femmes les coudront durant les veillées pour en faire les tenues traditionnelles : culottes de peau, tuniques, bottes et toques. Une sorte de cote aux longues jambes, en laine ou en en crin, vient compléter cette tenue comme sous-vêtement.
Au combat les Oynours préfèrent les stratégies de harcèlement car ils ne sont pas équipés pour le combat en mêlée. Leurs armures sont très rustiques : cotes de lanières de cuir bouilli soigneusement tressées qui couvrent le torse, les bras et le dos, bouclier rond renforcé au centre d'une plaque de fer et toque de fourrure renforcée d'une croute de cuir bouilli épais. C'est un équipement léger, conçu pour se déplacer rapidement, prélever des renseignements, une tête ou deux, et repartir !
L'armement Oynour se compose d'un ou plusieurs pichaqhi portés à la ceinture, d'un shemsher porté sur le dos derrière le bouclier et d'un arc à double courbure, le yay. Les Oynours emploient des flèches à double empennage et à pointe d'os. Certaines flèches sont normales, d'autres sont trempées plusieurs jours dans des excréments pour provoquer des blessures qui s'infecteront, d'autres enfin sont empoisonnées avec une baie rouge, la dobna. Mis en contact avec le sang, le suc de cette baie provoque de violentes douleurs incapacitantes au bout de quelques secondes, la paralysie du membre au bout de 20 minutes, et la mort par asphyxie au bout de deux ou trois heures. Seuls les dughaq connaissent l'antidote.
Les Oynours sont des experts du combat à cheval, ils savent tirer à l'arc tout en dirigeant leur cheval juste avec les genoux. Ce sont d'excellents chasseurs et tireurs à l'arc.
La langue et l'ecriture
La langue Oynour se compose principalement de chuintantes et de sifflantes, rythmées par des guturales. Les mots sont courts, précis. De manière surprenante, cette population barbare est pourtant lettrée à plus de 90% ! La quasi totalité des Oynours savent lire et écrire au moins trois ou quatre-cents idéogrammes (les utgas) de leur langue (qui en compte plus de deux-mille). L'écriture se fait sur des peaux, des écorces de saule ou de bouleau, et plus rarement sur du papier ou du parchemin. Le pinceau et le calame sont les plus utilisés, avec une encre tirée de plantes mises à macérer.
Chaque Oynour aime écrire son nom, son ascendance, ses origines. Les guerriers et les chasseurs portent dans le dos des oruulahs, des drapeaux droits sur lesquels sont écrits le nom, les origines, les faits d'armes du guerrier. Au dessus de chaque yükmaki flottent les oruulahs des membres de la famille. Au fur et à mesure de sa vie, un guerrier peut avoir besoin de porter plusieurs oruulahs dans le dos si ses faits d'armes sont trop nombreux !
De part leur facilité instinctive à connaître les langues et à les écrire, de nombreux Oynours ont été enrôlés dans l'énorme administration de l'Empereur Eternel comme scribes, savants ou linguistes.
La religion
Les Oynours ont été vaincus par l'Empereur, il a réussi à vaincre leurs dieux et il est donc devenu pour eux le dieu suprême. Les six anciens dieux sont toujours priés, mais uniquement sous une forme totémique, comme serviteurs de l'Empereur Eternel.
Le culte rendu à l'Immortel Empereur a lieu sous forme de sacrifices en nature : les impôts versés et surtout les hommes des tribus Oynours qui vont au combat pour lui. L'Empereur XIAH préfère les actes concrets aux prières... C'est plus utile pour son empire ! On lui rend toutefois un culte quotidien, en se tournant vers le poteau central du yörte ou du yukmaki qui devient à cet instant le centre de l'univers, le phallus divin. Les Oynours se prosternent devant, en cercle (ils forment ainsi les limites de l'univers et matérialisent le sexe féminin du monde que l'Empereur peut pénétrer) et demandent à leur dieu d'exaucer leurs prières et de leur accorder une bonne vie.
Les pratiques religieuses envers les six grands totems et la centaine de totems mineurs qui leur étaient inféodés (le Loup, le Renard, le Renne, le Faucon, le Vautour, la Truite...) n'ont pas changé sauf dans la pratique verbale. Autrefois, on accrochait un symbole du totem prié (une tête de l'animal, une peau, un masque le représentant...) au poteau central et on le priait directement. Maintenant, on dépose au pied du poteau central le symbole du totem, et dans les prières et les incantations on ajoute toujours « esclave de l'Eternel Empereur XIAH » après le nom du totem...
Le dugha est bien sur le maître des grandes cérémonies, mais c'est au sein de la famille, par la pratique du père pour les dieux mâles, et de la mère pour les déesses, que se fait l'essentiel du culte. On offre chaque jour un peu de nourriture aux totems et à l'Eternel Empereur XIAH, et des sacrifices plus violents sont offerts lors des quatre grands évènements qui marquent la vie d'un Oynour :
La naissance. Dès qu'il a trois jours, le bébé reçoit une scarification sur la poitrine. Le dugha pratique une entaille avec un couteau de silex et la remplit de cendres Goshak (des cendres de végétaux brûlés rituellement que l'on a d'abord fait bouillir, puis laissés évaporer, avant de refaire brûler le résidu. Les cendres Goshak reçoivent donc la bénédiction des trois éléments sacrés !) Si le bébé est une fille, l'entaille sera en forme de « S », si c'est un garçon elle aura une forme de bâton bien droit... Si le nouveau né survit à cette pratique, il sera dorénavant un membre à part entière du clan.
La puberté. A l'arrivée des premières règles pour les filles, des premiers poils de barbe pour les garçons, les jeunes sont séparés de la famille et vont vivre quelques temps chez le dugha. Il leur enseigne les secrets qu'ils doivent connaître et leur fait pratiquer pour la première fois le rituel du Yerü. Ils avalent un mélange de Kubhak et de champignons hallucinogènes et partent dans le monde des dieux... Ils rencontrent leur animal totem et développent un lien avec lui. Une fois revenus dans le monde des mortels, le dugha leur trace au milieu du dos l'idéogramme du nom de leur totem à l'aide d'une scarification mêlant cendre Goshak et sang du dugha. Le jeune peut dorénavant se marier et avoir des enfants...
Le mariage. Vers 15 / 16 ans, les jeunes sont mariés. Le bashliq doit donner son accord pour chaque union, afin qu'aucune union incestueuse, aucun mariage maudit, ne puisse se créer (et éviter que des familles trop puissantes ne se constituent face à la sienne !). Après un grand repas qui peut durer plusieurs jours, le jeune couple emménage dans le yükmaki du marié. Si au bout de quatre saisons l'épouse n'est toujours pas enceinte, le mariage est considéré caduque. Les jeunes se séparent et l'épouse retourne dans sa famille. Si l'épouse est enceinte on attend que l'enfant naisse. Les deux parents reçoivent alors une troisième scarification, au dessus du sexe, en forme d'arc et flèche pour l'homme et de coupe pour la femme. Ils sont maintenant définitivement mariés, et le clan aidera le couple à fabriquer son yükmaki, on leur donnera quelques chevaux, une chèvre... De quoi démarrer dans la vie !
La mort. Quand sa vie est terminée, le Oynour reçoit des funérailles très spéciales... Avant qu'elles aient lieu le dugha coud les lèvres du mort avec un cordon en cuir de renne. Une dernière scarification sera placée au milieu du front, en forme de cercle.